Quel est l'aspect physique de d'Artagnan ?
Le d’Artagnan d’Alexandre Dumas a de multiples visages ; dessiné maintes fois par des illustrateurs talentueux puis incarné sur scène et au cinéma par des acteurs très différents, il correspond à l’image que chaque lecteur pourrait se faire de lui.
Le d’Artagnan de l’histoire n’a pas de visage. Aucun portrait qui nous soit parvenu, ne permet de l’identifier avec précision.
Seule, une gravure en noir et blanc, sans preuve d’authenticité, laisse imaginer l’homme qu’il a peut-être été…
Le buste cuirassé, les cheveux retombant sur les épaules, la moustache fine, taillée selon la mode de l’époque, le visage ovale bien proportionné, le front large et haut, les pommettes légèrement saillantes, le nez à peine busqué, le regard vif, l’ombre d’un sourire sur les lèvres, tel apparaît d’Artagnan tenant à la main le bâton de commandement, sur la gravure qui figure en tête de ses mémoires apocryphes rédigées par Courtilz de Sandras...
...La gravure est anonyme, sans date. Quelle authenticité lui accorder ? Sans doute a-t-elle été réalisée d’après un portrait aujourd’hui disparu du capitaine-lieutenant des mousquetaires. Bien que de qualité plutôt médiocre, elle laisse deviner l’élégance de la silhouette mince et nerveuse. D’Artagnan était mousquetaire et pour être mousquetaire il fallait être bien fait de sa personne, plutôt grand, car le roi le souhaitait.
Odile Bordaz
Et que dire de son portrait moral ?
D’abord qu’il était gascon et qu’il en avait certainement les traits les plus caractéristiques.
Ensuite qu’il était humain, fidèle, courageux, aimé des puissants qu’il a servi avec zèle, respecté par tous et suffisamment héroïque pour avoir pu inspirer son double - ce héros de légende - ni vraiment le même, ni foncièrement différent.
D’Artagnan, c’est le Gascon, disons mieux le Français par excellence, à l’esprit juste et alerte, au corps souple et vigoureux, au cœur bon et compatissant, qu’aucune difficulté ne trouve en défaut, que n’effraie aucun danger, qu’aucune infortune ne laisse insensible, habile enfin au jeu de la finesse comme au jeu de la force, mais toujours loyal et brave comme son épée.
Cette renommée universelle, Charles de Batz Castelmore, dit d’Artagnan (…) n’en a joui ni de son vivant ni même longtemps après sa mort...
...Ce fut un brave gentilhomme, un homme de guerre expérimenté, à l’occasion un adroit diplomate, et, en toutes circonstances, un Gascon souple et délié sans être courtisan.
Charles Samaran
Le portrait de d’Artagnan ne peut être fait que par touches impressionnistes, par bribes de témoignages, par suppositions et par déductions.
Finalement, toutes les représentations qui ont été faites de lui peuvent lui convenir… en partie.
Si elles se sont surtout inspirées du personnage créé par Dumas, ce dernier s’est inspiré de Courtilz de Sandras... qui s’est inspiré du vrai d’Artagnan.
Malgré son courage et sa valeur, d’Artagnan ne manquait pas de quelques défauts. Il semble notamment avoir été doué comme ses amis, d’un assez mauvais caractère (…) intraitable dans son orgueil, pénétré de sa valeur, vite renfrogné et en même temps procédurier en diable, chicanier, porté à discutailler sans fin.
Armand Praviel
En authentique gentilhomme du dix-septième siècle, en véritable « honnête homme », selon l’expression du temps, d’Artagnan réunissait les qualités d’un officier d’élite et d’un gentilhomme irréprochable.
Odile Bordaz
Bienveillant et humain (…) provoquant d’ailleurs l’émotion de Mme de Sévigné…
Stéphane Baumont
Un fort honnête homme et qui méritait bien l’estime et la confiance que le roi
avait mises en lui.
Mlle de Montpensier
Et les femmes ? Courtilz de Sandras lui a prêté en ce domaine – et l’on ne prête qu’aux riches- maintes aventures qu’il ne convient évidemment pas de prendre au pied de la lettre. (…) On aurait peine à en trouver une preuve (…)
...Mais au fond, toutes ces bonnes fortunes si généreusement prêtées au Gascon par les romanciers, si elles ne sont pas vérité d’Histoire, reflètent assez bien la vie sentimentale désordonnée d’un jeune militaire à la fin du règne de Louis XIII ou sous la régence d’Anne d’Autriche.
Jean-Christian Petitfils
Si l’histoire a rendu à d’Artagnan sa vérité, elle est restée trop pauvre, trop sèche pour lui redonner la vie. Aussi, pour rendre au mousquetaire gascon, sa dynamique, intrépide, joyeuse et lucide vitalité, a-t-il fallu qu’intervienne le roman (…) Oui, à cette personnalité si typiquement gasconne, alliant le réalisme au panache, la solidité à la fantaisie, le froid au feu, il fallait, pour la rendre plus vraie que le vrai, aussi un Dumas !
André Laffargue