Situé dans la commune d’Artiguedieu-Garrané, à environ 5 km au Nord-Ouest de Seissan, le château du Garrané « occupe la plateforme d’un mamelon en bordure de la vallée du Cédon. C’était l’un des fiefs de la châtellenie de Durban » René Caïrou
Sa situation géographique est fort différente de la plupart des châteaux gascons, plutôt situés dans les zones où des tensions pouvaient exister entre l’Angleterre et la France, durant cette Guerre de Cent ans qui divisa la Gascogne.
Le château du Garrané est ainsi bien à l’écart et son rôle défensif n’était certainement pas aussi « essentiel », car il était loin des conflits, dans ce Comté de l’Astarac resté fidèle à son suzerain, le Comte de Toulouse, et au Roi de France.
Pourtant, c’est un château particulièrement intéressant, car il comporte des architectures du XIIe, XIIIe et XIVe siècles. « Un château gothique, appuyé sur une tour romane », comme le définit son propriétaire.
Ce grand bâtiment est de forme rectangulaire de près de 30 mètres de long sur une douzaine de large, bien qu’il soit un peu asymétrique.
Il garde du XIIe siècle, une haute tour carrée à l’angle Nord-Ouest, qui a été dérasée et qui devait être accolée à un autre bâtiment aujourd’hui disparu. Cette tour présente une petite curiosité : une chapelle romane y a été installée, étudiée par P. Mesplé, qui a publié, en 1958, un article dans le Bulletin de la Société Archéologique du Gers à ce sujet.
Elle pourrait être contemporaine de la tour, ou même antérieure, car elle conserve à sa base les traces d’une chapelle plus ancienne, aux fenêtres pré-romanes semblables à celles de Saramon, qui dateraient du XIe siècle. D’ailleurs, l’abondance de fenêtres de cette petite chapelle est particulièrement étonnante.
Au XIIIe siècle, un corps de logis est venu s’accoler sur les angles Sud-Ouest et Nord-Est de cette première tour. Ce bâtiment est presque carré.
Au XIVe siècle, le château s’agrandit d’un autre corps de logis (soudé au premier) et d’un donjon sur la façade Sud. Cette adjonction est restée visible et les fenêtres de la chapelle ne s’ouvrent plus sur l’extérieur.
« Cette partie gothique se caractérise surtout sur la façade Est par ses trois ouvertures au premier étage : deux fenêtres sont à croisillons et l’une d’elles est dominée par un larmier très caractéristique. Entre celles-ci, une élégante fenêtre géminée en arc brisé, trilobée, est non moins surprenante. » Guilhem de Certaines.
Le château était entouré, à l’Ouest, d’une enceinte fortifiée (peut-être datant du XIe siècle) dont il ne reste aujourd’hui que quelques vestiges.
Par la suite, notamment au XVe d’autres aménagements sont venus transformer ce château féodal en demeure plus confortable. Ainsi, la façade Ouest est percée à l’étage de baies à meneaux et une belle cheminée à bandeau de pierre moulurée orne l’étage du corps de logis.
C’est le deuxième niveau du corps de logis qui servit d’étage noble, tant au XIVe siècle que par la suite.
Le donjon a subi les outrages du temps et s’est effondré à partir de son deuxième niveau vers le milieu du XIXe siècle.
C’est un château qui représente bien le mode de reconstructions successives par réutilisation de lieux existants.
Comme le dit René Caïrou « Ce château illustre la politique d’économie suivie par bon nombre de seigneurs du XIVe siècle : on ne rebâtit pas les châteaux existants, on les restaure et on les aménage pour les adapter aux aspirations du moment. »
Au XVIIIe siècle, le château fut utilisé comme métairie et tomba peu à peu dans l’abandon. Il fait, depuis plusieurs années, l’objet d’intenses restaurations de la part de son actuel propriétaire et il a été, fort heureusement, sauvé de la ruine qui le guettait.
Les seigneurs du Garrané
Le premier seigneur du Garrané, dont le nom nous soit parvenu, est Arnaud du Garrané, qui fût le bâtisseur de la partie gothique, du XIVe, du château.
Vers 1450, un autre Arnaud du Garrané épousa Jeanne, fille de Manud de Lasseran qui apporta en dot à son mari, les terres de son nom.
Ce noble Arnaud, devenu seigneur du Garrané et de Lasseran, eut un fille héritière, Marguerite, qui apporta à son tour ces terres à Bertrand de Luppé, lorsqu’elle l’épousa en 1469.
Ce Bertrand était le frère cadet de Bernard 1er, seigneur de Luppé, de qui descendent les Luppé existant aujourd’hui et, par eux, l’actuel propriétaire.
Depuis ce jour et jusqu’à aujourd’hui, Garrané est resté aux mains de cette famille.
« La branche des Luppé du Garrané, seigneur du Garrané, Lasseran et Besmaux s’éteignit en 1904 par la mort sans enfant de Marie de Luppé, Comtesse George Dillon. Son héritier fut son neveu, Jacques Dillon, mon grand-père. C’est ainsi que la terre du Garanné n’a fait l’objet, depuis le XIIe siècle, d’aucun acte de vente. » Guilhem de Certaines.