Le château de Lagardère se dresse à l’ouest du village du même nom à quelques kilomètres au nord de Vic-Fezensac. Une petite chapelle, à proximité, en complète le cadre et lui offre un charme tout particulier.
Comme son nom l’indique - celui qui garde - sa position est dominante et offre un magnifique panorama aux alentours.
Cette position stratégique permettait à cette maison forte de surveiller la vallée de l’Osse et d’étendre sa vision au Nord-Ouest presque jusqu’à Eauze.
Il s’agit, fait exceptionnel, d’un des rares châteaux gascons dont la construction est datée. Le premier texte connu de 1270 est l’acte de donation par le comte d’Armagnac Géraud V, à Auger, abbé de Condom et à ses religieux, de tout le territoire qu’il possédait au lieu dit La Gardère… Les termes de l’acte stipulent que l’abbé en titre ou ses successeurs « peuvent construire, édifier un ouvrage fortifié, forteresse, bastide et tout autre édifice y compris une bastide… sur le lieu et territoire appelé La Gardère. Le comte réservant pour lui et ses successeurs, le droit de faire occuper l’ouvrage fortifié à construire, par ses hommes lorsque les circonstances le justifieront. »
Son plan est en forme de trapèze de 28 mètres de long avec 12 mètres de large d’un côté, contre 10 mètres de l’autre. Les murs ont 1 mètre 50 d’épaisseur.
A l’origine, c’est un corps de logis massif, flanqué de deux tourelles, sans cour intérieure, avec un rez-de-chaussée quasiment aveugle et comportant trois niveaux.
Pour Philippe Lauzun « Il offre au point de vue archéologique cette particularité que, par son état de conservation, il permet de saisir sur le vif le but que s’était proposé son architecte et les dispositions prises par lui pour l’attaque et pour la défense. » et, de plus « il fait le mieux comprendre l’idée première qui a présidé à son élévation. Rien, en effet, depuis six cents ans, n’est venu détruire, ni même modifier ses dispositions primitives. »
Ce caractère si « intègre » de l’architecture de Lagardère est fortement remis en cause par la suite par René Caïrou qui signale des remaniements au XIVe et au XVIe siècle et par Christian Corvisier qui les situent tous, quant à lui, au XVIe siècle.
Jacques Gardelles, quant à lui, prend une position médiane, en disant « Il s’agit d’un château gascon typique en ce sens qu’il a subi peu de remaniements ».
De fait, le château de Lagardère a fait l’objet d’au-moins trois études architecturales détaillées.
Lauzun lui consacre une monographie complète en 1894. René Caïrou l’étudie en 1986 dans son ouvrage dédié à l’Architecture militaire des XIIIe et XIVe siècle et Christian Corvisier propose une étude et une reconstitution des parties manquantes de l’édifice sur le site de l’association Lagardère.
Cette association, qui regroupe une grande partie des familles portant ce nom, a entrepris depuis plusieurs années, un travail remarquable de restauration et de fouilles. On trouvera donc sur leur site, une description complète du château ainsi que toutes les hypothèses émises par Christian Corvisier sur les transformations subies par ce dernier avant son abandon vers la fin du XVIIIe - début du XIXe siècle. A confronter avec les publications de Lauzun et de Caïrou ….
Pour tous les amateurs de roman de cape et d’épée, il faut néanmoins rappeler que le château n’a malheureusement rien à voir avec le personnage du Bossu, immortalisé par l’écrivain Paul Féval et son fameux « Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi »
Cependant, le site actuel du château permet sans conteste à l’imagination de revenir au temps du Régent et de croire - ne serait-ce qu’un instant - que l’on a enfin percé le secret de la fameuse botte de Nevers.
Les seigneurs de Lagardère
Les chanoines de Condom sont les bâtisseurs et premiers possesseurs du château de Lagardère, à partir de 1270 et le restent jusqu’au XVIe siècle.
En 1578, Pierre de Lavardarc est acquéreur du château de Lagardère, que les chanoines lui cèdent par voie d’échange. « Cette famille de Lavardac était originaire de l’Astarac. On trouve son nom mêlé à la plupart des affaires des XVe et XVIe siècle. » Philippe Lauzun
Le château de Lagardère reste dans la famille de Lavardac jusqu’en 1621, malgré quelques problèmes de dîme envers les chanoines de Condom et d’héritage compliqué entre les descendants.
En 1621, Jean de Maniban se porte acquéreur du château. C’est un homme de robe de Bordeaux, nouvellement venu dans la région et propriétaire du domaine du Busca. Il emprunte cependant la somme de 3200 livres à Philippe de Pins, seigneur d’Aulagnières, pour pouvoir acheter le château et ne peut s’en montrer le propriétaire qu’au terme de sa dette acquittée, en 1630.
Les Maniban conservent le château de Lagardère pendant plus d’un siècle et demi, mais résident dans le château voisin du Busca, plus somptueux et nettement plus confortable. Il semble qu’ils utilisent surtout Lagardère comme un bâtiment agricole.